Dans les forêts du paradis de Tristan Savin
Écrit par David Debrincat sur 15 mars 2022
Dans cette nouvelle chronique littéraire, Bruno vous embarque à la découverte du bilan de trente années de voyage, récit de Tristan Savin, dans les forêts du paradis.
Grand reporter, chroniqueur littéraire et écrivain, Tristan Savin dirige la revue de voyage Long Cours. Il est l’auteur d’une douzaine d’ouvrages dont le dernier qui nous intéresse aujourd’hui, paru en 2021.
Dans les forêts du paradis
Au fil des quelques deux cent cinquante pages de ce livre, l’auteur se souvient de trente années de voyages. Le voilà à la découverte des forêts du monde. Son paradis perdu. Mais pas n’importe quelle forêt. Les forêts tropicales, sauvages, encore presque intactes et vierges. Derrière les arbres, il y voit la faune et les humains. Ceux qui habitent cet espace unique qu’il nous faut protéger pour nous protéger nous-mêmes.
Cette chronique littéraire montre que Tristan Savin sait regarder au-delà du visible. Il questionne notre rapport à la nature. L’auteur soulève le voile d’une certaine spiritualité bien cachée à l’abri des larges feuilles humides de ces vastes forêts. Il narre son chemin initiatique, sa quête d’un paradis qu’il ne veut pas perdre car il lui est indispensable.
L’arbre…
Au cœur des forêts, il y a l’arbre, ce pilier du ciel plongeant profondément ses racines dans la terre nourricière. Les Celtes imaginaient justement l’arbre Monde séparant le Ciel et la Terre et abritant de nombreuses créatures. Dans la religion juive, l’arbre est lié à la Kabbale. Arbre de vie chez les Egyptiens, arbre de la connaissance dans la genèse. La symbolique, rattachée à l’arbre de par le vaste monde, le relie à la sagesse, l’épanouissement, le cycle de la vie et encore l’immortalité.
Bien souvent l’homme s’en est emparé à son profit. Ne parlons nous pas d’arbre généalogique, représentation indispensable pour se reconnecter avec les racines de sa famille et porter les bourgeons remplis d’espoir des générations à venir ? Toujours, à moins d’être totalement insensible, l’arbre inspire le respect. Il est des arbres sous toutes les latitudes. Mais ceux qui attiraient et attirent toujours Tristan Savin sont avant tout tropicaux. Ils s’épanouissent dans les vastes forêts chaudes et humides, là où l’exubérance et la beauté de la nature ne connaissent pas de limite.
Des souvenirs de Tristan Savin
Avant de plonger dans toute cette verdure, pour lui tout commença à l’ombre des forêts de sapins dans les Vosges. A la page 15 de son livre, il se souvient :
« Mes premières joies d’enfant sont exclusivement campagnardes et sylvestres. Je me reconnaissais dans Sylvain et Sylvette, ces personnages de bande dessinée : ils vivaient dans une charmante chaumière, en pleine forêt au milieu des animaux. »
Dans les Alpes, plus précisément au pied du massif du Vercors, dans la maison de sa grand-mère, un chêne peint sur le mur de la cuisine entretenait cette passion naissante pour les arbres et aussi pour l’origine des choses et leurs racines car cet arbre était l’arbre généalogique de sa famille.
A la poursuite de son rêve
Les années passent et l’enfant devient adulte. Il vole de ses propres ailes. Les courants d’air le guidèrent vers sa première jungle, mexicaine. Il évoque ce moment crucial de sa vie avec gourmandise à la page 39 de son livre :
« A Palenque j’ai découvert pour la première fois la jungle dans toute sa majesté. De gros lézards gambadaient sur les escaliers de pierre, des papillons dansaient autour de moi. Un iguane sortait sa tête hirsute des sous-bois, des fourmis géantes remontaient un tronc d’arbre, un ara rouge et bleu piaillait sur une branche. La forêt alentour, avais-je lu dans le South American Handbook (la bible du voyageur occidental), est peuplée de coatis, d’ocelots, de pécaris et de tapirs. Et j’espérais en voir sortir l’une des dernières panthères. Je n’en ai pas aperçu le museau, hélas, mais mon arrivée a été saluée par une colonie d’atèles, ces drôles de singes-araignées aux membres démesurés et à la queue préhensile utilisée comme cinquième membre. La canopée est leur royaume. Ils s’y déplacent avec une vélocité prodigieuse et curieusement ne se posent jamais au sol. »
Retour à la réalité ?
Suite à ce voyage, Tristan Savin est-il, lui, revenu au sol ? Rien n’est moins sûr. Car dès son retour il traça deux traits parallèles sur une carte pour délimiter la zone tropicale des forêts du monde.
De l’Asie du Sud-Est à l’Amérique Centrale, du nord de l’Amérique du Sud en passant par le nord de l’Australie pour finir par l’Afrique subsaharienne. Puis, selon son propre aveu, il pointa les endroits où il rêvait de poursuivre son pèlerinage sylvestre à la recherche du paradis perdu. Sans doute, au-delà de la beauté de cet environnement forestier baigné de soleil et de pluie. L’auteur percevait déjà la dimension supplémentaire, spirituelle, générée en ces lieux uniques. Un lieu naturel où l’homme peut encore se reconnecter à la nature. Ses petits points posés sur une carte ont guidé l’auteur pendant trente ans à Madagascar, au Mexique, en différents pays d’Asie du Sud-Est, à Bornéo, dans les îles du Pacifique et en Amazonie.
Ah l’Amazonie ! Le Graal des forêts vierges ! Tristan Savin écrit à la page 93 de son livre :
« Je rêvais donc, depuis l’enfance, de mettre les pieds en Amazonie. Ce serait mon grand voyage initiatique, à la découverte d’une jungle vaste comme un continent. » Quelques pages plus loin, il poursuit : « C’était ma première nuit en Amazonie. Je n’arrivais pas à trouver le sommeil à cause de la chaleur, toujours aussi étouffante, et des bruits incessants de la jungle, pleine d’une mystérieuse agitation. La faune nocturne semblait plus active que celle de la journée. Au moment où je commençais à m’habituer au coassement des grenouilles et au crissement des insectes, je fus envahi par une excitation inhabituelle, proche de l’euphorie. Je réalisais à quel point j’avais la chance, inouïe, de me trouver ici, bercé par le lent balancement
de mon hamac. »
Des secrets et des espoirs
Page après page, avec son rapport aux arbres, l’auteur nous dévoile les secrets de son cœur, de ses angoisses et de ses espoirs. C’est aussi ce que veut montrer cette chronique littéraire. Lors de son voyage dans les îles du Pacifique, il relate en page 199 de son livre : « Il m’aura fallu ce voyage au bout du monde pour comprendre, enfin, la véritable raison de mon besoin, si impérieux, de vivre parmi les arbres, dans la verdure, les grands espaces. »
Suit l’histoire de son traumatisme d’enfant vécu sous les bombes en Jordanie, quelques décennies auparavant. Je n’en dirais pas plus, laissant au lecteur le plaisir de la découverte. Forêt après forêt, des millions d’arbres dans le regard, Tristan Savin finit par poser son sac à dos en… Bretagne.
Le paradis trouvé de Tristan Savin
Derrière de hautes haies et au milieu d’un jardin rempli d’arbres, il a découvert son havre personnel. Et comme le hasard n’existe pas, les précédents propriétaires avaient planté là des arbres venant des quatre coins d’une planète, qui rappelons le est bien ronde. Un cèdre de l’Himalaya, un tilleul d’Amérique, un noyer, un érable, un eucalyptus, un magnolia. Peut-être n’y manquait il qu’un arbre des voyageurs ? Cet arbre des régions tropicales nommé ainsi parce qu’il conserve de l’eau pure à la base de ses feuilles pour étancher la soif de celui qui va de l’avant.
Alors il est bon, au fil des pages de ce récit de Tristan Savin, de se laisser bercer de branches en branches, de troncs en troncs pour découvrir l’essence de la nature et le sens de la vie. Et comme l’a si bien écrit Jean-Christophe Ruffin dans la préface de ce livre :
« La seule certitude est que, dans le moment qu’on va passer avec Tristan Savin dans les forêts du monde, un bonheur profond nous est, pour quelques heures, offert. Profitons en. »
Dans les forêts du paradis, de Tristan Savin aux éditions Salvator, collection Chemins d’étoiles. Disponible chez tous les bons libraires.
Retrouvez l’intégralité de cette chronique littéraire en podcast. Bonne lecture à tous.
En espérant que cette nouvelle chronique littéraire vous a plu, rendez-vous très bientôt.
Salut à tous ! Je suis David, j’ai 25 ans depuis maintenant un peu plus de 15 années. Je suis Palois d’origine maltaise. Naïf, fou, obstiné, voici donc les trois qualités (ou défauts, ça dépend du point de vue) qui m’entraînent depuis plus de 20 ans sur les chemins de notre belle planète…la suite par ICI!