Voyager sans argent sur le chemin de Compostelle
Écrit par Boris Pierard sur 27 avril 2021
C’est un peu par hasard que mon ami Sam et moi nous nous retrouvons sur le chemin de Compostelle. Nous sommes des aventuriers dans l’âme. Nous aimons marcher des journées entières dans des paysages sauvages et monter notre campement à la fin de la journée. Nous sommes dans le Sud-Ouest de la France quand nous commençons à voir des coquillages par terre et sur des panneaux. Pour le délire nous les suivons, sans vraiment savoir vers quelle destination cela allait nous mener.
Nous voyageons sans argent mais avec une guitare. Nous avons pour habitude de jouer une petite heure dans une ville; afin de collecter un peu d’argent pour nos vivres et de s’isoler dans la nature. Nous aimons aussi rencontrer des gens et proposer notre aide en échange d’une douche ou d’un lit pour la nuit. Nous avons cette philosophie, entre, se retirer de temps en temps dans la nature et partager des merveilleux moments avec les locaux.
Lorsque nous commençons à suivre les coquillages, beaucoup de questions nous traversent l’esprit. Nous connaissions le nom de St Jacques de Compostelle et le pèlerinage mais sans savoir ce que cela représentait.
En route !
Très vite, les gens que nous rencontrons nous souhaitent « buen camino », ce qui nous implique davantage dans l’aventure. On nous explique aussi que sur le chemin il y a des auberges pour les pèlerins. Mais nous n’en avions vu aucune jusqu’à présent. Nous sommes sur le circuit mais encore en dehors du vrai pèlerinage. Nous dormons à la belle étoile et nous n’avons pas encore croisé de pèlerins.
Nous sommes dans la petite ville de Potes en Espagne. Nous avons appris que nous devions avoir la crédenciale, le passeport du pèlerin que l’on tamponne a chaque arrivée, ainsi qu’une carte avec les étapes à parcourir. Nous décidons d’aller à l’église et de faire les démarches pour l’obtenir. Cette nuit là, nous dormons également dans l’auberge de la ville pour la première fois.
Sur le chemin de toutes les épreuves
Voilà, nous commencions l’aventure du pèlerinage. Les premiers jours, nous sommes heureux de marcher vers St Jacques de Compostelle. Nous commençons à rencontrer des gens qui marchent avec nous et nous fréquentons les auberges municipales gratuites. Plus ou moins une vingtaines de kilomètres par jour. Très vite, nos petites économies s’essoufflent. Nous devons nous arrêter pour jouer de la guitare afin de pouvoir nous payer à manger et parfois l’auberge.
Nous sommes confrontés à l’aspect commercial du chemin et de tout le business qui tourne autour. Par exemple, il faut payer l’entrée d’une église pour la visiter… Nos relations avec les locaux deviennent plus brèves, un simple “bonjour” et “bon chemin”. Nous constatons que c’est bien rodé et que les locaux ont l’habitude de croiser les pèlerins. Les jours s’enchaînaient et nous commencions à nous sentir seuls, même si nous marchions souvent avec des pèlerins. Beaucoup d’entre eux sont dans le défi sportif. D’autres aiment se réunir en équipe pour franchir les étapes, certains sont de grands solitaires…
J’ai voulu abandonner plusieurs fois, ou plutôt sortir du chemin pour revenir à des bases plus humaines. Mon ami Sam m’a toujours motivé à continuer. Jusqu’au jour où j’ai jeté mon sac par terre en criant « C’est n’importe quoi ce pèlerinage ! On marche tous les jours dans une solitude ennuyeuse. Nous n’avons même plus de contact simple avec les locaux! Il faut tout payer et j’ai l’impression que les gens qui marchent le font pour l’afficher sur leur CV ! ».
Il nous est également arrivé de nous présenter dans quelques auberges en leur expliquant que nous n’avions pas d’argent. Mais à chaque fois l’aide était refusée. Je me sentais loin de la religion, de la foi et de l’esprit d’entraide.
La prise de conscience sur le chemin de Compostelle
Ce pèlerinage est un voyage introspectif, personnel. On est confronté à nos propres difficultés mentales et physiques. Chaque pas est une remise en question, nous devons puiser au fond de nous les ressources nécessaires pour avancer. Comme si nous étions face à notre miroir. Ce pèlerinage nous permet de connaître nos faiblesses et nos qualités. J’ai compris cela lorsque j’ai accepté de souffrir. Lorsque j’ai accepté de connaitre la personne que je suis au travers des étapes. Ce pèlerinage est une belle métaphore de la vie avec ses hauts et ses bas. Nous apprenons à nous surpasser, à agir différemment de nos habitudes jusqu’à trouver une paix intérieure sous la chaussure.
Mes plus beaux souvenirs sont les pèlerins qui nous ont aidés. Ils se sont par exemple cotisés pour que nous puissions dormir dans les mêmes auberges qu’eux. Ils nous ont partagé leur nourriture et soutenu jusqu’à la fin.
Arrivés à St Jacques de Compostelle, nous étions heureux d’avoir vécu cette aventure. Et pour nous donner une petite leçon de plus, la grande église était fermée. Marcher tout ça pour rien ! Comme quoi ce n’est jamais la destination le plus important mais le chemin en lui-même.
Salut ! Moi c’est Boris , je suis belge et j’ai 35 ans …et pour la suite c’est par ICI !